Des hommes, Laurent Mauvignier,2009, Les éditions de Minuit.
Laurent Mauvignier né à Tours en 1967 a notamment écrit Apprendre à finir,2000, Dans la foule 2006, Histoires de la nuit, 2020.
«On ne sait pas ce qu’est une histoire tant qu’on n’a pas soulevé celles qui sont dessous et qui sont les seules à compter, comme les fantômes, nos fantômes », écrit Laurent Mauvignier. Il explore ces strates dans un récit qui, à partir d’un esclandre lors d’une fête, donne à entendre ceux qui ont fait la guerre d’Algérie, taiseux pendant des décennies : « appelés » des campagnes françaises, harkis engagés du côté de la France pour un salaire mais prêts à trahir, pieds-noirs ruinés du jour au lendemain qui ne pourront pas faire le deuil de l’Algérie française. Laurent Mauvignier le répète, « Ce n’est pas un livre sur la guerre d’Algérie », « C’est un livre sur la mémoire que la guerre d’Algérie a laissée sur des gens. »(festival Effractions 2021 ).Le lecteur vit la guerre d’Algérie à travers l’évocation des souvenirs et des cauchemars d’un petit groupe d’hommes pour qui tourner la page est d’autant plus impossible que leur vécu de soldats a été nié par leurs proches.Laurent Mauvignier scrute les états d’âme, les consciences de ces appelés qui n’avaient pas le choix de faire ou de ne pas faire ce que leurs chefs demandaient, c’était la guerre. Le récit chargé d’une grande tension se déroule sur moins de vingt-quatre heures, avec de longs retours en arrière pendant la nuit,moment propice à cette relecture du passé, un passé complexe et déterminant pour comprendre aujourd’hui ces hommes etinstruire le procès de Bernard. C’est un très bon livre à l’écriture très visuelle comme Histoires de la nuit.
Et l’histoire ?
C’est un samedi après-midi de 2009.Dans un village de campagne, Solange, une veuve, fête avec parents et amis ses soixante ans. Bernard surnommé Feu-de-Bois à cause de son odeur s’avance vers Solange, sa sœur, et lui offre une grande broche en or nacré de chez Buchet, horlogers-bijoutiers depuis deux générations. C’est la sidération dans l’assemblée : comment cet alcoolique, crasseux, sans le sou, a-t-il pu acheter un bijou de si grande valeur ? Humilié, Feu-de-Bois s’en prend à Chefraoui, un « bougnoule », le passé fait irruption dans sa vie. C’est le chaos dans la salle. Solange s’absente. Le narrateur, Rabut, déteste Feu-de-Bois mais il ne peut pas lefrapper, ils sont cousins, de plus Rabut est conseiller municipal, il fait partie des Anciens d’Afrique du nord et il y a le passé, leur passé. L’esclandre prend fin avec le départ de Feu-de-Bois. Il neige. Chefraoui quitte la fête car c’est l’anniversaire de sa fille, voit la mobylette de Feu-de-Bois dans sa cour, retrouve les siens terrorisés, passe à la gendarmerie….
Fanny Celsiana
Laurent Mauvignier né à Tours en 1967 a notamment écrit Apprendre à finir,2000, Dans la foule 2006, Histoires de la nuit, 2020.
«On ne sait pas ce qu’est une histoire tant qu’on n’a pas soulevé celles qui sont dessous et qui sont les seules à compter, comme les fantômes, nos fantômes », écrit Laurent Mauvignier. Il explore ces strates dans un récit qui, à partir d’un esclandre lors d’une fête, donne à entendre ceux qui ont fait la guerre d’Algérie, taiseux pendant des décennies : « appelés » des campagnes françaises, harkis engagés du côté de la France pour un salaire mais prêts à trahir, pieds-noirs ruinés du jour au lendemain qui ne pourront pas faire le deuil de l’Algérie française. Laurent Mauvignier le répète, « Ce n’est pas un livre sur la guerre d’Algérie », « C’est un livre sur la mémoire que la guerre d’Algérie a laissée sur des gens. »(festival Effractions 2021 ).Le lecteur vit la guerre d’Algérie à travers l’évocation des souvenirs et des cauchemars d’un petit groupe d’hommes pour qui tourner la page est d’autant plus impossible que leur vécu de soldats a été nié par leurs proches.Laurent Mauvignier scrute les états d’âme, les consciences de ces appelés qui n’avaient pas le choix de faire ou de ne pas faire ce que leurs chefs demandaient, c’était la guerre. Le récit chargé d’une grande tension se déroule sur moins de vingt-quatre heures, avec de longs retours en arrière pendant la nuit,moment propice à cette relecture du passé, un passé complexe et déterminant pour comprendre aujourd’hui ces hommes etinstruire le procès de Bernard. C’est un très bon livre à l’écriture très visuelle comme Histoires de la nuit.
Et l’histoire ?
C’est un samedi après-midi de 2009.Dans un village de campagne, Solange, une veuve, fête avec parents et amis ses soixante ans. Bernard surnommé Feu-de-Bois à cause de son odeur s’avance vers Solange, sa sœur, et lui offre une grande broche en or nacré de chez Buchet, horlogers-bijoutiers depuis deux générations. C’est la sidération dans l’assemblée : comment cet alcoolique, crasseux, sans le sou, a-t-il pu acheter un bijou de si grande valeur ? Humilié, Feu-de-Bois s’en prend à Chefraoui, un « bougnoule », le passé fait irruption dans sa vie. C’est le chaos dans la salle. Solange s’absente. Le narrateur, Rabut, déteste Feu-de-Bois mais il ne peut pas lefrapper, ils sont cousins, de plus Rabut est conseiller municipal, il fait partie des Anciens d’Afrique du nord et il y a le passé, leur passé. L’esclandre prend fin avec le départ de Feu-de-Bois. Il neige. Chefraoui quitte la fête car c’est l’anniversaire de sa fille, voit la mobylette de Feu-de-Bois dans sa cour, retrouve les siens terrorisés, passe à la gendarmerie….
Fanny Celsiana