A la ligne : feuillets d’usine, Joseph Ponthus, La Table Ronde, 2018.
Joseph Ponthus né en 1978 à Reims est décédé en 2021 à Lorient.
Le sujet du livre, la condition ouvrière au XXI ème siècle,n’est pas original mais sa forme l’est. A la ligne est un long poème en vers libres, sans ponctuation. Cette forme traduit les cadences du travail et l’absence de pauses dans les lignes de production dans l’agroalimentaire. L’auteur consigne sous forme d’un journal de 66 chapitres son expérience de deux ans d’intérimaire en Bretagne. Il travaille dans des conserveries de poissons et dans des abattoirs. Ce témoignage de l’intérieur sur une longue durée est particulièrement précieux.
Pour l’auteur, les intérimaires du XXIème siècle sont « l’armée de réserve » dont parle Karl Marx, des anonymes qui ne valent que par leurs bras, soumis à un patron tout puissant. Le livret de suivi est particulièrement infantilisant. Dans l’agroalimentaire, les intérimaires font un travail de forçat mais paradoxalement l’auteur, un intellectuel, tient le coup et magnifie les tâches en leur donnant une signification. Il s’approprie à chaque fois son usine. Dans une langue épure Joseph Ponthus raconte les tâches dans leur plus banale nudité. Il dit la primauté du temps dans la vie de l’ouvrier : l’attente de la débauche, du week end, de la paie, des retrouvailles avec son épouse. Le narrateur supporte la pénibilité de la vie à l’usine parce qu’il a fait des études et qu’il écrit. La culture est son arme. Et A la ligne est un texte très riche. Tout au long du témoignage, le narrateur-auteur convoque les mythes. Lorsqu’il est à l’abattoir, le sang lui rappelle la Grande Boucherie de la guerre de tranchées et il compare les ouvriers aux gueules cassées d’Otto Dix. Son texte est ainsi truffé de références littéraires et historiques.
Fanny Celsiana
Joseph Ponthus né en 1978 à Reims est décédé en 2021 à Lorient.
Le sujet du livre, la condition ouvrière au XXI ème siècle,n’est pas original mais sa forme l’est. A la ligne est un long poème en vers libres, sans ponctuation. Cette forme traduit les cadences du travail et l’absence de pauses dans les lignes de production dans l’agroalimentaire. L’auteur consigne sous forme d’un journal de 66 chapitres son expérience de deux ans d’intérimaire en Bretagne. Il travaille dans des conserveries de poissons et dans des abattoirs. Ce témoignage de l’intérieur sur une longue durée est particulièrement précieux.
Pour l’auteur, les intérimaires du XXIème siècle sont « l’armée de réserve » dont parle Karl Marx, des anonymes qui ne valent que par leurs bras, soumis à un patron tout puissant. Le livret de suivi est particulièrement infantilisant. Dans l’agroalimentaire, les intérimaires font un travail de forçat mais paradoxalement l’auteur, un intellectuel, tient le coup et magnifie les tâches en leur donnant une signification. Il s’approprie à chaque fois son usine. Dans une langue épure Joseph Ponthus raconte les tâches dans leur plus banale nudité. Il dit la primauté du temps dans la vie de l’ouvrier : l’attente de la débauche, du week end, de la paie, des retrouvailles avec son épouse. Le narrateur supporte la pénibilité de la vie à l’usine parce qu’il a fait des études et qu’il écrit. La culture est son arme. Et A la ligne est un texte très riche. Tout au long du témoignage, le narrateur-auteur convoque les mythes. Lorsqu’il est à l’abattoir, le sang lui rappelle la Grande Boucherie de la guerre de tranchées et il compare les ouvriers aux gueules cassées d’Otto Dix. Son texte est ainsi truffé de références littéraires et historiques.
Fanny Celsiana